Description du projet

LA TERRE PROMISE

Sur la crête de l’Épouvante, le curé Labelle flanqué de ses guides, contemple la Terre promise qui se déroule à l’infini devant lui. Ses rivières, ses lacs, et ses massifs arrondis qui, de loin en loin, se dressent comme autant de promesses et d’espoirs qui nourrissent son rêve de reconquête française du Canada.

En 1870, le missionnaire colonisateur mena les premières expéditions au-delà de Sainte-Agathe, au pays de la Repousse. Les montagnes l’Épouvante et la Repousse se dressaient comme des remparts infranchissables freinant l’avancée des colons. Mais c’était sans compter sur l’inflexible détermination du curé qui, lui, était résolu à passer : «J’étais haletant et ruisselant de sueurs. Mon compagnon de voyage était éperdu en contemplant mon pénible état, il pensait que j’allais mourir et il voulait à tout prix rebrousser chemin. Je décidai que nous devions aller jusqu’au bout, mettre le pied sur la crête de l’Épouvante ou mourir. Je parvins au but de mes désirs et j’en fus récompensé par le spectacle du bassin de la «Rivière au Diable», de la montagne Tremblante et des rangs de montagnes qui couraient au loin, du nord au sud.» 1

Par la suite, on s’employa pendant plusieurs années à ouvrir une route carrossable dont le tracé à travers le relief accidenté et capricieux de cette région fut maintes fois redessiné. En 1872, une voie qui contourne l’Épouvante est finalement aménagée. Dans La Terre promise, l’artiste nous présente le curé Labelle dans une scène qui rappelle celle de Moïse guidant son peuple vers la Terre promise. Elle s’est inspirée de chroniqueurs de l’époque qui associaient Antoine Labelle au personnage biblique.

LETTRE-PROGRAMME DU CURÉ LABELLE

Nous les enfants du Nord, nous les fondateurs de ce futur empire de l’Amérique du Nord, nous les hommes désignés à renouveler en Amérique les faits glorieux et célèbres de la vieille France, nous qui devons conquérir sur les Philistins anglais cette terre de l’Amérique, par notre vigueur, notre fécondité, notre habileté et par ces secours d’en haut qui nous viennent si à propos pour réaliser ces grandes conceptions. Il est de notre intérêt de rester, aussi longtemps que possible, sujets de la Grande-Bretagne pour avoir le bénéfice de ses ambassadeurs, de ses armées, de sa marine, sans qu’il nous en coûte un sou, ce qui nous permet d’employer tout l’argent que nous ménageons par là à faire prospérer le Dominion. Un jour nous serons nation indépendante et cette nation sera gouvernée par les hommes qui l’ont fondée, par conséquent en partie ou en grande partie par les enfants illustres de la race française. Ce n’est pas tout, nos rapports avec la France vont devenir plus intimes. Le commerce va grandir progressivement entre les deux nations. L’immigration française va devenir ruisseau, rivière et fleuve dans les temps à venir et c’est alors que la revanche de Montcalm sera accomplie par la voie pacifique de la force native de la race française sans même brûler une cartouche. Ce sera la plus grande victoire que jamais nation ait accomplie : conquérir nos conquérants ! 2

Carte : les monts de la Repousse et de l’Épouvante, Cécile Fleurant
La Terre promise : Le mythe du Nord québécois, Christian Morissonneau, 1978